Même si on a droit à du rab cette saison avec 40 matchs de saison régulière, les équipes WNBA n’ont plus qu’une quinzaine de matchs à disputer avant les playoffs ou, pour certaines, les vacances. Pour tenter d’y voir plus clair sur les enjeux et les forces en présence avant le sprint final, on a essayé de se poser quelques questions.
Le Sky évitera-t-il la catastrophe totale ?
On avait un peu joué les oiseaux de mauvais augure en début de saison en voyant James Wade bazarder les futurs premiers tours de Draft du Sky pour que son équipe reste compétitive immédiatement. Après un démarrage encourageant, ce qui devait arriver… arriva. James Wade a pris la poudre d’escampette pour rejoindre le staff des Toronto Raptors sur un timing très discutable, laissant Chicago sans head coach, sans GM et sans possibilité de se reconstruire grâce à l’excitante Draft 2024. Il ne faut rien retirer à ce que Wade a réussi d’admirable avec le Sky, son travail a été colossal et couronné d’un titre de champion. Mais cette fin est quand même particulièrement amère. Ce qui nous amène à cette fameuse interrogation sur l’avenir à court terme de la franchise.
Si on utilise le mot “catastrophe”, ce n’est pas un hasard. Pour l’heure, Chicago est 8e et donc virtuellement qualifié pour le premier tour des playoffs. La saison, malgré ce que l’on vient d’évoquer, serait alors au moins un peu réussie sportivement. On a pu voir en NBA qu’une équipe qualifiée de justesse pouvait atteindre les Finales, même si ici cela semble un peu utopique. Dans le cas contraire, le move de Wade prendrait une tournure dramatique, puisque le Sky subirait une double peine : pas de playoffs pour contenter les fans, et pas de pick de qualité au 1er tour de la Draft pour repartir sur des bases nouvelles. L’équipe désormais coachée par Emre Vatansever (avec Yoann Cabioc’h comme assistant 👏👏) va donc tout faire pour résister aux assauts des Los Angeles Sparks, toujours au contact malgré une période difficile, ou espérer qu’une équipe comme Minnesota s’écroule un peu.
Dans tous les cas, à la place du front office du Sky, qui vient de voir Dwyane Wade arriver comme actionnaire et va devoir composer une nouvelle équipe dirigeante et un nouveau staff, on essaierait coûte que coûte de récupérer un pick au 1er tour de la Draft 2024, dans l’espoir de pouvoir sélectionner une joueuse sur laquelle axer la reconstruction. Quitte à sacrifier Kahleah Copper, irréprochable depuis le début de ce bazar, après avoir vu partir une à une toutes ses camarades du titre 2021.
Y a-t-il vraiment quelqu’un pour empêcher les Aces de réussir le back to back ?
Un titre n’est jamais gagné d’avance en WNBA. Surtout lorsqu’un back to back est en jeu (personne n’y est arrivé depuis les Sparks au début du siècle…). Mais il faut quand même bien reconnaître que Las Vegas fait une impression incroyable et semble nettement au-dessus de la mêlée, alors que l’on imaginait New York pas si éloigné en termes de niveau et de potentiel. La blessure de Candace Parker, que l’on est pas sûrs de revoir cette saison, et les problèmes judiciaires de Riquna Williams ont assombri un peu la fin du mois de juillet, mais le constat reste le même. A l’heure qu’il est, aucune équipe n’a autant de certitudes que les Aces. Las Vegas n’a perdu que deux matchs depuis le début de la saison et peut toujours réussir le meilleur bilan de l’histoire de la WNBA en saison régulière. A’ja Wilson, Kelsey Plum, Jackie Young, Chelsea Gray et le reste du casting sont performantes et animées d’une vraie confiance en elles. Becky Hammon pilote toujours le tout de main de maître. Encore une fois, rien n’est joué d’avance mais, flingue sur la tempe, on parie aujourd’hui sans trembler sur une victoire des Aces dans quelques semaines. New York a le talent mais manque d’osmose collective, Connecticut a l’osmose collective et la détermination mais manque peut-être un poil de talent, et le reste de la meute a l’air un peu tendre pour espérer stopper la machine de Sin City.
Qui de Stephanie White ou Tanisha Wright sera coach de l’année ?
Vous noterez qu’on met volontairement de côté Becky Hammon (qui continue d’être parfaite mais avec un challenge moins complexe), Sandy Brondello et Latricia Trammell, respectivement en tête de la ligue, deuxième et quatrième. C’est parce qu’un bon classement ne fait pas tout et que pour la première, il y a une continuité qui représente un challenge un peu moindre. A nos yeux, les deux saisons les plus méritantes et impressionnantes sont réalisées par Stephanie White et Tanisha Wright avec le Sun et le Dream.
Epaulée par Briann January (❤), White a fait un retour tonitruant en WNBA, en composant avec de nombreux départs, la pression de succéder à Curt Miller et la blessure dévastatrice de Brionna Jones. Connecticut est troisième, pas très loin du Liberty, et pratique un basket solide où les forces de chacune sont parfaitement exploitées. A Atlanta, Tanisha Wright, aidée elle par Vickie Johnson (❤), a fait du Dream l’une des équipes les plus divertissantes, intéressantes et prometteuses de la ligue. Cinquième au coude à coude avec Dallas, Atlanta bénéficie de l’excellent travail tactique et humain de l’ancienne joueuse de Seattle. Si l’une des deux est sacrée en fin de saison, ça nous ira bien.
Diana Taurasi atteindra-t-elle les 10 000 points en carrière ?
A vrai dire, c’est bien la seule raison pour laquelle “DT” a un quelconque intérêt à fouler encore le parquet sur la vingtaine de matchs qui restent à jouer. Le Mercury sera bien placé dans la prochaine Draft et garder de l’énergie pour sa probable dernière saison en WNBA en 2024 semble être une bonne idée. A l’heure de ces lignes, Taurasi est à 9929 points et Phoenix a encore 17 matchs prévus au calendrier. Il lui manque 71 points pour atteindre cette marque inédite des 10K. Il faudrait donc qu’elle tourne à un peu plus de 4 points par match jusqu’à au terme de la saison pour y parvenir.
Spoiler : même si elle a manqué quelques matchs récemment à cause d’une blessure à l’orteil, elle y arrivera. La meilleure marqueuse de l’histoire de la WNBA revient normalement au jeu ce weekend et, bien que son crépuscule soit proche, elle tourne encore à 14 points de moyenne… Cet accomplissement historique sera l’une des rares raisons pour le Mercury de faire la fête cette saison.
Qui est encore en course pour le MVP à ce stade de la saison ?
Il reste 17 matches à l’heure de ces lignes et bien malin qui peut affirmer aujourd’hui qui succédera à A’ja Wilson dans quelques semaines. A’ja Wilson elle-même pour un back to back ? Possible. L’intérieure des Aces fait encore une saison très solide et est même statistiquement au-dessus de ce qu’elle faisait en 2022. Les partisans d’un titre de MVP décerné à “la meilleure joueuse de la meilleure équipe” y trouveront leur compte, même si A’ja, aussi forte soit-elle cette saison, n’a pas été à chaque instant la joueuse la plus impactante des Aces (coucou Jackie Young, qui ne gagnera pas mais réalise aussi une saison phénoménale). Parmi ses concurrentes, Breanna Stewart est dans une forme tonitruante et ne sera encore pas loin du compte, elle qui est sur les bases de sa meilleure saison en carrière sur le plan statistique. Le Sun ne serait pas sur le podium, ni crédible pour jouer les outsiders, sans la machine qu’est Alyssa Thomas, pas si loin du triple-double de moyenne avec plus de 14 points, 9 rebonds et 8 passes par match…
Sauf surprise, le trophée se jouera entre ces trois-là, même si Jackie Young, Satou Sabally ou Napheesa Collier font des saisons d’un niveau assez incroyable et méritent d’être dans la discussion.
Les Sparks vont-elles être un peu moins maudites avec les blessures ?
On l’espère ! Los Angeles n’est que 9e au général, mais le sentiment qui ressort pour le moment de cette saison 2023 est plutôt positif. Curt Miller rêvait forcément d’un peu mieux, mais on n’avait plus vu une équipe autant frappée par les blessures depuis bien longtemps. Il faut donc nuancer et se dire que lorsque Miller a pu compter sur le noyau dur qu’il envisageait à son arrivée, les Sparks ont proposé un basket efficace et qui donne envie de passer à la suite. Ce même groupe renforcé par une rookie de talent (et il y en a plein dans la Draft 2024) et après quelques ajustements a de quoi retrouver le haut du tableau.
Les Lynx vont-elles tanker ? Doivent-elles y songer ?
C’est dur d’imaginer Cheryl Reeve accepter que son équipe fasse profil bas une deuxième saison de suite. Surtout que les Lynx ont très bien rebondi après une entame catastrophique et sont virtuellement qualifiées pour les playoffs, à la 7e place, avec une Napheesa Collier sublime. Mais… il s’agirait de ne pas oublier que la Draft 2024 regorge de joueuses talentueuses avec, sauf si elle change d’avis, une certaine meneuse originaire du Minnesota qui rêve de porter le maillot des Lynx avec sa copine, l’excellente Dorka Juhasz, si l’occasion lui est donnée… Cette équipe va être l’une des plus intéressantes à observer ces prochaines semaines, justement pour voir quelle trajectoire elle choisira d’adopter. Collier vient de se blesser à la cheville et on ne peut pas exclure le fait qu’il s’agisse peut-être d’un signe…
Quels enjeux pour les Françaises ?
On aurait aimé ajouter “et pour les Belges” dans l’intitulé de la question, mais nos chères Cats ont décidé de se concentrer sur la sélection (à raison, puisqu’elles sont allées décrocher le premier titre européen de leur histoire 🥳). Trois françaises sont en action sur cette fin de saison régulière, dans des contextes différents :
- Marine Johannès est toujours la coqueluche du public US grâce à son jeu divertissant, mais alterne un peu le chaud et le froid en termes d’impact sur les matchs du Liberty. Son adresse et sa production (39% pour 7.4 points/match) sont inversement proportionnelles aux frissons qu’elle déclenche au moins une fois par apparition sur un dribble ou un shoot lunaire. Son temps de jeu (19 minutes en moyenne) ne devrait pas beaucoup changer d’ici la fin de la saison régulière et c’est en playoffs que New york aura besoin qu’elle tienne ce rôle de 6e joueuse et d’élément imprévisible qui fait parfois changer le cours d’une série.
- Gabby Williams, qui a elle aussi cruellement manqué aux Bleues lors du dernier Euro, a petit à petit réintégré l’effectif du Storm, une fois remise du choc à la tête qui l’a privée du tournoi. Gabby a joué cinq matchs dans cet effectif rajeuni et qui pour seul objectif de prendre un peu de bouteille avant un renfort de taille lors de la Draft 2024. Gabby a besoin de jouer et a participé aux cinq derniers matchs du Storm avec un apport offensif timide mais un temps de jeu croissant (35 minutes à New York l’autre jour) et une activité all-around toujours aussi appréciable.
- Iliana Rupert prend ses marques avec Atlanta depuis le retour de l’Eurobasket et est apparu à 6 reprises, avec 11 minutes de temps de jeu en moyenne et un impact intéressant bien que ses opportunités en attaque soient limitées. Tanisha Wright tente des choses et des associations pour voir de quelle manière l’utiliser de manière optimale. Elle semble en tout cas se sentir bien dans ce nouveau groupe et on espère à la fois la voir faire une bonne fin de saison régulière et jouer un rôle dans la rotation du Dream. Pas comme lors de la dernière post-saison avec Las Vegas, même s’il y a eu un titre au bout.
- Il s’agirait de ne pas oublier Kadi Sissoko, qui est tout de même apparu à 23 reprises avec Phoenix pour sa saison rookie. Le temps de jeu de l’ailière du Mercury est à géométrie variable (tantôt 2 minutes, tantôt 15), mais elle montre qu’elle a tout à fait sa place dans une rotation WNBA alors qu’elle est méconnue dans son pays. Son entretien avec BeBasket est d’ailleurs très intéressant et permet de mieux connaître la native d’Aubervilliers. Au fur et à mesure que la saison avance et que Phoenix active un peu plus le mode tanking, les chances de la voir davantage en action augmentent et c’est tout ce qu’on lui souhaite. Par ailleurs, elle effectuera son retour en LFB du côté de Charleville la saison prochaine.