Stéphanie m’avait fait promettre d’éviter à tout prix de parler de football sur Swish Swish, sauf si cela impliquait la géniale Megan Rapinoe – bientôt Rapinoe-Bird 😍 – sous peine d’être impitoyablement censuré. Il m’a semblé que l’occasion se prêtait malheureusement à un petit contournement de cette promesse.
Diana Taurasi, celle que beaucoup considèrent comme la G.O.A.T. du basket féminin, vient de perdre son idole. Et il s’agissait, pour le coup, d’un joueur de football. Diego Maradona s’est éteint mercredi à la suite d’un arrêt cardiaque après 60 ans d’une vie marquée par ses coups de génie sur le terrain et ses nombreux excès en dehors. Pour comprendre l’importance qu’avait “El Pibe de Oro” pour Taurasi, il faut évidemment s’en référer aux origines de la superstar du Phoenix Mercury.
Si Diana Taurasi est née en Californie, son coeur et son sang sont en partie albicelesti, ciel et blanc. Sa mère Liliana est née en Argentine et c’est là-bas qu’elle a fait la connaissance de Mario Taurasi, un gardien de but italien venu jouer professionnellement en Amérique du Sud. Quelques années plus tard, le couple a migré aux Etats-Unis, où leurs filles Diana et Jessika ont vu le jour.
Très petite, Diana a été piquée par la passion que partage tout Argentin qui se respecte pour Diego Maradona. Elle n’a que quatre ans quand le numéro 10 et sa troupe remportent la Coupe du monde 1986, avec ces deux buts qui ont fait sa légende : le premier sur une main volontaire qui lui a valu l’étiquette de tricheur pour le reste de sa carrière, le second sur un rush de 60 mètres après avoir éliminé la quasi totalité de l’équipe adverse. Mais déjà, le foyer des Taurasi vibre et “DT” partage cette ferveur, cette foi, alors qu’elle n’est pas encore en train d’écumer les playgrounds de Chino Hills.
Elle vivra aussi de loin, mais avec douleur, ses moments les plus sombres, comme son expulsion en pleine Coupe du monde 1994 chez elle, aux Etats-Unis, pour un contrôle positif à la cocaïne.
Diana Taurasi a beau raconter à ses parents qu’elle a rencontré Michael Jordan, Kobe Bryant et d’autres monuments de son sport, aucun n’arrive à la cheville de Diego Maradona pour Mario et Liliana. Le rêve se réalise finalement lors des Jeux Olympiques 2008, à Pékin.
Diana Taurasi n’est pas facilement impressionnable. Les récits de ses premières interactions avec Jordan, par exemple, le prouvent bien. Mais lorsque l’occasion de rencontrer Maradona – qu’elle prononce et prononcera toujours avec un fort accent espagnol pour le folklore – c’est une autre histoire.
Grâce à l’intervention d’Adam Silver, alors simple adjoint de David Stern en NBA, Taurasi est conduite dans les travées de la salle où se déroule le match entre l’Argentine et les Etats-Unis chez les hommes. Diego Maradona est assis et profite du spectacle, en grand fan de basket qu’il était, lorsqu’il voit s’approcher cette jeune femme dont il ignore l’adoration qu’elle lui voue.
L’interaction est courte, mais forte. Les deux légendes de leur sport s’embrassent, quatre fois, échangent quelques mots en espagnol et prennent une photo ensemble au beau milieu du public.
En redescendant, Taurasi est comme une enfant, toute fière d’avoir pu approcher l’icône et revient s’asseoir auprès de son amie Sue Bird, hilare, qui vient justement de filmer la scène.
Dans le live Instagram au long cours auquel elle avait participé avec Sue Bird et Megan Rapinoe, Diana Taurasi avait assez magnifiquement raconté ce moment inoubliable pour elle et expliqué ce que représentait Maradona pour elle.
“Pour les Argentins, c’est bien plus que Michael Jordan pour les Américains. Maradona, là-bas, c’est JFK ou Abraham Lincoln. […] Ils sont allés voir Diego pour leur dire que mes parents étaient argentins, que je voulais venir le voir, etc… Je suis montée et je lui ai dit ‘Diego, je t’aime, merci pour tout, tu es le dieu de l’Argentine’.
Quelques années plus tôt, la triple championne WNBA avait déjà essayé d’expliquer ses sentiments et ceux du peuple argentin pour l’intéressé.
“Diego est un dieu pour tous les Argentins. Il est celui qui nous représente le mieux, dans les bons, comme dans les mauvais moments. C’est notre champion, notre divinité”, racontait “DT” pour ESPN.
Depuis mercredi et l’annonce du décès de Diego Maradona, l’Argentine a décrété un deuil national de 3 jours. C’est aussi la discrétion et la réserve qu’a pour le moment choisi de suivre Diana Taurasi. Au même titre qu’elle est parvenue à rendre hommage de manière splendide à Kobe Bryant sur et en dehors du terrain, il faut s’attendre à quelque chose de très particulier de la part de la star du Mercury dans les mois qui viennent.
Même si vous détestez le football – c’est votre droit le plus strict – essayez de regarder la vidéo ci-dessous sans le moindre frisson à l’écoute des commentaires argentins après le deuxième but de Maradona contre l’Angleterre en 1986.
